Nouvelles érotiques au féminin, poésies saphiques, littérature lesbienne

De l'essentiel au non-essentiel, le pourquoi du comment.

De l'essentiel au non-essentiel, le pourquoi du comment.

Bien… Je pensais passer à travers mais non, ça s’en va pour mieux revenir et ça semble bien parti pour rester. Bref, il n’aura échappé à personne que le covid is back. Le malin a bien surfé sur nos vacances d’été, nos échanges festifs, nos verres en terrasse et l’anniversaire de mamie qui n’a pas pu dire non aux épanchements joyeux de ces petits enfants bienveillants mais tout aussi envahissants. Et nous voilà reparti pour un pic, que dis-je, une péninsule épidémique et sournoisement contagieuse. Pas de repos pour les braves. Pas de miracle pour les caves. T’as joué, t’as perdu. Tu as fait la fête tout l’été ? Tu as dansé ? Et bien mouche-toi maintenant ! Fléau pré-apocalyptique, le virus se joue de nos grands airs, se moque de nos pseudo-rebellions et s’installe là où il veut, chez qui il veut sans autre invitation que notre mollesse à suivre des consignes sanitaires somme toute de base. Lave-toi les mains, porte un masque et va pas crachouiller au visage de la blonde d’à côté sous prétexte qu’après deux bières, tu te prends pour Apollon, chantre de la Beauté et immortel. Non. Au mieux t’es beau et con à la fois. Au pire, tu seras juste positif dans 48H00 après avoir descendu les fonds de verres de tes voisins qui avaient la tête ailleurs. Tu aurais pu penser que s’ils reniflaient, c’est pas parce qu’ils avaient l’alcool triste mais plutôt les premiers symptômes de la bête. Sans parler de la brune asymptomatique sur laquelle tu t’es rabattu faute d’avoir conquis la blondasse et à qui tu as roulé de virulents patins bavouilleux. En même temps, tu étais aussi bourré qu’elle… Circonstance éternuante.

Bref, on ne va stigmatiser personne. Oui, moi aussi ça m’arrive de partager mon bol de cacahuètes avec ma copine. Voilà. C’est tout. Et je vais même aller jusqu’à jouer mon Trump : On va s’en sortir. Ca finira bien par disparaître.

Non. Aujourd’hui, mon regard est ailleurs. Vers une différenciation toute aussi cruciale que le virus est belliqueux, à savoir : l’essentiel et son pendant, le non-essentiel.

Et là vous l’aurez compris, il y a dichotomie. Disjonction. Et au bout du compte, division.

Qu’est-ce qui est essentiel ? Qu’est-ce qui ne l’est pas ? That is the la question comme aurait dit ma mère.

Nous voilà confronté à un vrai problème : définir ce dont nous pouvons nous passer ou pas, ce qui nous est vital ou superflu, utile ou inutile. Et c’est là où les athéniens s’éteignirent ! Car ce qui m’est nécessaire à moi peut ne pas l’être pour toi et vice et versa.

Ainsi donc il nous faut catégoriser. Et le gouvernement a tranché. D’un côté la bouffe et la bibine. Ca, même pas on en discute, bien qu’il y aurait beaucoup à en dire. En effet, à ton plus besoin de pâté Hénaff que d’une boite de caviar Petrossian ? Qu’est-ce qui est le plus essentiel entre un pack de Cristalline et un whisky 15 ans d’âge ? Là, pas de problème, on nous laisse le choix. En revanche, pas question d’acheter des petites culottes ou une nouvelle doudoune. Pareil pour le dernier best seller de Guillaume Michel Musso Bussi. Pas question de renouveler son Petit Robert ni sa paire de Converse mais on peut, en revanche et en toute impunité, se balader autour des gondoles, non pas de Venise, mais de Leroy Merlin, Castro, Brico, Mal au Dos, à la recherche d’une peinture pour plafond ou d’une perceuse à percussion. On peut acheter des plantes mais pas des parfums. Pourtant, majoritairement, les deux sentent bon. On peut aller changer ses pneus mais pas ses faux ongles. Choisir un lave-vaisselle mais pas son nouvel appartement. Passer son permis de conduire sans pour autant être autorisé à prendre des leçons. Logique ? Je ne sais pas. Mais cela nous en dit long sur notre société. Et nous découvrons que les lecteurs n’ont pas la chance des fumeurs qui eux peuvent continuer de peaufiner leur futur cancer en achetant dans leur bureau de tabac préféré, leurs petites tiges hors de prix. Et oui. Contrairement aux suceurs de filtres, le lecteur, lui, n’a plus le droit d’aller acheter sa came. Et même s’il voulait tricher, et, penaud et contrit, acheter en grande surface son futur ouvrage, et bien ce n’est plus possible. Le gouvernement, gardant une oreille sur le libraire dit indépendant, a rectifié son tir de missile. Tu peux donc toujours te procurer un ordinateur japonais, un aspirateur chinois ou un téléphone made in US mais pas le dernier opus de ton auteur préféré auprès des gilets vert et jaune qui sont pourtant tout aussi de bons conseils et souriants. Quant à l'auteur, dans cette bagarre, lui, reçoit une double peine. Il n’a plus de revenus et on lui balance à la tronche que son art n’est pas essentiel… Rude… Bien sûr, on peut encore détourner les règles et aller acheter tous ces produits sur des plateformes de vente internet. Ca, le gouvernement n’y peut rien. Ni les libraires. Et ça fait la joie de notre ami Amazon, ce géant américain aux pieds agiles qui nous vend de la daube chinoise sans payer d’impôt en Europe. Ah lui, il la connaît pas la crise. Il s’en fout. Il vend. Il livre. On paye. Essentiel ou non-essentiel, aucune différence. En un clic, le tour est joué.

Alors oui je reviens vers toi, petit bonhomme en mousse qui n’a eu cure des avertissements. Qui a continué à vivre ta vie sans te préoccuper des lendemains qui déchantent. Qui, pour un verre de plus, une heure de pseudo liberté, pour mieux maltraiter ton foie, à préférer l’ivresse à la sagesse, la jouissance à la prudence, la provocation à la précaution. Toi qui nous as, au fil de tes soirées festives, familiales et sportives, créé un joli pont d’Avignon où le virus y danse, y danse.

Parce que ce n’est pas le libraire, le responsable. Ni le restaurateur qui ne fait plus que 20 couverts sur les 45 habituels. Ni la vendeuse de fringues qui patiemment nettoie après chaque essayage sa cabine. Ni l’esthéticienne qui de toute façon était déjà bien précautionneuse avant tout ce tintouin. Non. C’est la faute à la Carmagnole que tu dansâtes tout l’été. Aux réunions sur les terrasses puis aux fêtes clandestines dans les appartements après qu’on eût fermé les premières. C’est la faute à l’inconscience, au refus des règles. C’est le ralliement de la désobéissance civique devenue à la mode de chez nous et qui fonctionne parce que des décérébrés pensent que c’est chic de n’en faire qu’à sa tête.

Non. Ce n’est pas chic. C’est égoïste. Et aujourd’hui, tout le monde paie l’addition. Les essentiels et les non essentiels. Tout le monde mélangé dans le même bateau qui coule, et pas que du nez, inexorablement.

Alors oui, petit bonhomme en mousse, toi aussi tu vas vouloir qu’on vienne te sauver. Te soigner. T’assister. Te protéger. Et là, j’ai juste envie de te dire d’aller te faire voir, parce qu’à mes yeux, tu n’es pas essentiel. Tu comprends ?

Et en attendant le jour béni où il y aura un vaccin contre la connerie, nos auteurs pourront toujours faire imprimer leurs œuvres sur PQ. Parce qu’encore une fois, force est de constater, au vu des caddys remplis, que nettoyer sa merde, ça, ça restait un essentiel.

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