Nouvelles érotiques au féminin, poésies saphiques, littérature lesbienne

Portrait

 

 

Je ne m’habituerai jamais à cette présence et pourtant, elle est bien là, assise, le corps en arrière, à côté de moi, calée dans ce fauteuil club, doux et rond, couleur havane. Je la regarde. Elle aussi, comme moi, tape sur son clavier, fervente, concentrée, sa bouche exprimant de temps à autre un soupir ou une grimace selon la difficulté du problème à résoudre. Je ne sais pas combien de temps a pu passer depuis que je la regarde… une heure ?.. une journée ?... une partie de ma vie ? des mois sans doute, mais combien exactement ? Je ne m’habituerai jamais à cette présence.

 

Je ne m’habituerai jamais à ses soupirs, d’amour ou de souffrance, selon que les alizés soufflent réguliers ou s’affolent, s’élevant brusquement en altitude, invincibles invisibles, pour alors inverser leur course. Car lorsqu’elle me regarde, elle sourit. Toujours. Où s’inquiète. Aussitôt. Si ses grands yeux bruns, profonds, si profonds, intenses, si intenses, captaient alors dans mon regard une obscurité même passagère. Alors elle me le demande « fais moi le plus beau des sourires ». Me l’implore. Alors je le lui offre même si parfois il reste en moi. Je sais qu’elle le voit. Elle le souligne d’un rire. Je ne m’habituerai jamais à ses soupirs.

 

Je ne m’habituerai jamais à ses mots, ses discours, sa parole farandole qui jaillit après ses silences, source ayant enfin trouvé sa lumière, pointant hors de sa terre, s’écoulant avec force, rapidité, débit incroyable puis soudain douceur, presque lenteur comme la rivière se love dans le fleuve, comme le fleuve s’ouvre et pénètre le lac, là où tout se calme, s’alanguit, presque s’arrête. Puis reprend, soudain, calme savamment trompeur, lorsqu’une chute soudain en cascades vivaces reprend son flot et l’emporte encore plus loin, sans doute vers la mer, là d’où elle vient. Je ne m’habituerai jamais à tous ses mots.

 

Je ne m’habituerai jamais à son pas, lorsqu’il s’étend, se fait nerveux ou dansant, parfois lourd d’une humeur triste ou si léger lorsqu’elle ne veut pas corrompre mon sommeil. Elle s’éloigne alors et les lames du parquet se taisent, s’assouplissent, à peine chuchotent. Dans les rues, elle marche vite lorsqu’elle va seule. Presque elle courre. Vers quel destin ? quelle affaire si pressante doit se demander le passant surpris de cette longue silhouette furtive. Dans les rues, elle marche lentement lorsque sa main, attachée à la mienne, m’accompagne, donnant le rythme nonchalant à nos promenades sillonnées de baisers. Je ne m’habituerai jamais à son pas.

 

Non.

Je ne voudrais pas de cette habitude là

Jamais

 

Mais plutôt de l'émerveillement

Répété

D'être en vie

Avec elle.

 

 

 

 

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E
<br /> ne jamais s'habituer pour laisser place aux surprises plutôt qu'à la routine, tel est le secret de l'amour éternel<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Alors c'est assez paradoxal mais la routine peut être aussi un ciment extraordinaire à l'amour. Un poids, et un lien presque intangible... mais vous avez raison, il faut toujours s'en étonner.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Bon j'ai harangué, harangué, mais telle soeur Anne je ne vois rien venir, moi la pauvre malade a la voix cassée (en rien sexy je vous assure), avec un mal de crâne carabiné, je n'ai rien a me<br /> mettre sous la dent, même pas un tout petit texte de Dame Pilote...et en plus votre site ne se souvient jamais de moi...c'est trop injuste (Chimères aussi en mode Caliméro)...<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Pardon ma bien chère Chimères... je vais gronder cette administration qui vous ignore ainsi ! (cela étant, si elle ne se souvient pas de vous, mi, je n'ai pas eu de message m'avertissant de votre<br /> commentaire ! Grrr !!) J'espère surtout, que depuis vous allez beaucoup mieux ! Promis, juré, craché, je m'y remets !<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Bonsoir. Toujours autant de talent. :) Une fois de plus,un plaisir de te lire. Après le site entrelles, j'aurai bientot un nouveau support via lequel j'aimerais faire de la pub pour ton blog. Si tu<br /> es intéressée, n'hésites pas à me faire signe via mon site ou directement à l'adresse mail indiquée. :) Et merci encore pour ce texte.<br /> Bonne soirée.<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Ce sera avec grand plaisir. Avez-vous eu mon mail ?...<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> sourire...<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Et malgré mon temps de réponse, j'espère qu'il est toujours affiché ce beau sourire !<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Wouawwwwww! J'adoreeee<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Avec un (immense) retard.... Mercccciiiiiii !!!!!!<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Est-ce bien raisonnable de me dire des choses comme ça, je vous le demande!<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> ... ha bon ?....<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Vous m'avez permis de vous haranguer, chère Dame Pilote, donc je ne vais pas me priver...cela fait bientot un mois....va falloir faire quelque chose!!!<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Et bien vous avez raison, Dame Chimères, haranguez-moi !... oui mais pas tout de suite.... pas trop vite... sachez me convoiter.... me désirer... me captiver.... Haranguez moi....<br /> Haranguez-moi....<br /> <br /> <br /> <br />
P
<br /> Madame La Pilote ... Je reviens sur votre texte ... regulierement a la maniere de la vague qui vient tutoyer la dune par deux fois en une seule journee. Il est doux et si porteur. Et si vous devez<br /> vous habituez a une seule chose alors que ce soit pour le merveilleux, pour le vrai ...<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> ... et bien même cela je ne veux pas m'y habituer pour en garder l'éphémère et me donner à chaque nouvelle seconde l'envie de la suivante...<br /> <br /> <br /> <br />
B
<br /> l'attente de vous lire est parfois longue... trop longue, mais quel enchantement à chacun de vos mots, quelle récompense. Et non ne vous habituez pas, si ce n'est à l'émerveillement, à la<br /> découverte de l'Autre<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> Je me rends compte que j'avais laissé votre "bulle" en suspends.... pardon... le temps passe si vite, si vite... alors un merci tardif mais sincère d'être encore et toujours fidèle malgré mon peu<br /> d'activité actuelle. Je parle de l'écriture bien sûr car pour le reste... comment dire ?... il serait temps de poser enfin les valises...<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Bon, si il faut vous "rabrouer" pour vous lire de nouveau, et comme "qui aime bien chatie bien!", je me dévoue...<br /> <br /> Votre café, fait tendrement pour vous, est servi!<br /> <br /> <br />
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M
<br /> <br /> ... décidément... je n'ai répondu à personne moi... mille pardons... le café serait-il encore un peu chaud ?...<br /> <br /> <br /> <br />