Nouvelles érotiques au féminin, poésies saphiques, littérature lesbienne
3 Novembre 2009
- Ben vous en avez mis du temps !
- J’ai fait ce que j’ai pu, (répondis-je d’un ton sec et angoissé), que se passe-t-il ?!
- Y’a votre copine dans les coulisses. Vous me l’embarquez et on la revoit plus ici ! et soyez discrète, si le patron la voit ici, je donne pas cher de sa peau !
Qu’est-ce que c’était que ce délire ?! Qu’avait donc bien pu faire Lian pour mériter une telle menace ? Je savais que le milieu de la nuit, principalement dans cette zone sulfureuse qu’est Pigalle avec son commerce de sexe, avait des coulisses peu fréquentables, mais à ce point ?
Je retrouvais le chemin qui m’avait conduit la première fois vers la jeune femme, mais cette fois, elle ne se trouvait pas, fébrile et impatiente, contre un décor à m’attendre. C’était un homme de très petite taille habillé en Monsieur Loyal qui s’y trouvait et me fit entrer, sans un mot, dans une minuscule loge. Il referma aussitôt la porte derrière moi en me faisant signe d’être discrète et, me désignant sa montre, certainement de me dépêcher. Mais pourquoi ? J’entendis un soupir, ou plutôt un gémissement.
Derrière un rideau décoloré et effiloché, prostrée, recroquevillée au sol, se trouvait Lian. La jeune femme ne broncha pas à mon arrivée. Je m’agenouillai vers elle. Assise sur le sol, elle se cramponnait à ses genoux qu’elle tenait serrés contre elle, se cognant le front contre, en petites tapes répétées. Je l’appelais doucement par son prénom.
- Lian… Lian… qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que se passe ? parle moi…
Mais Lian ne me répondait pas. Tendant l’oreille, j’entendis un vague murmure, une psalmodie que je ne comprenais pas. Je lui pris doucement le bas de son visage dans ma main que je relevais délicatement. Mon choc fut à la hauteur, je pense, de la douleur qu’elle devait éprouver. Indépendamment du maquillage piteusement défait, je remarquais aussitôt au niveau de son arcade sourcilière droite un hématome violet avec une coupure longue de deux, trois centimètres de laquelle s’écoulait un filet de sang. Sa lèvre était tuméfiée, et saignait aussi à la commissure. Ses mains que je détachais l’une de l’autre avec peine étaient écorchées, coupées, gonflées. Son corsage était déchiré et avait perdu plusieurs boutons. Lian me regarda enfin, semblant me reconnaître. Cela eut comme effet instantané de redoubler ses sanglots. Elle balbutiait mon nom, comme une supplique.
- … Martine…. Martine…
Je n’avais, de ma vie, je pense, vu pareille détresse. La porte de la loge s’ouvrit avec fracas. L’homme de petite taille apparut, le visage consterné, désolé, paniqué aussi. Aussitôt, derrière lui, la stature d’un homme imposant se cala dans l’ouverture de la porte, bloquant toute initiative de départ. Je reconnus celui qui, lors de mon premier passage au cabaret de La Vie en Rose, annonçait avec enthousiasme le numéro de chanson de Lian.
L’homme ne semblait plus être dans les mêmes dispositions chaleureuses et admiratives envers la jeune femme. Il fulminait, éructait, rouge de colère, congestionné de rage. La frêle silhouette de l’homme de petite taille ne m’apparut pas comme un bouclier protecteur bien efficace. Lian ne bougeait toujours pas. Il me fallait prendre une décision, rapide. Je vais être honnête, je ne suis pas très courageuse et je préfère souvent piteusement prendre la tangente qu’affronter un problème. Mais bizarrement, si je sens à côté de moi une peur supérieure à la mienne, alors ma panique s’estompe instantanément et se meut en force. Je me relevais donc, prête à affronter la décharge haineuse qui se profilait devant moi. J’attaquais la première.
- Ecoutez, je ne sais pas ce qu’il se passe ici, mais visiblement, il faudrait que tout le monde reste calme.
- Sale petite pute d’ordure ! Je vais te défoncer la gueule, moi !
Je pris une grande respiration pour tenter de maîtriser la terreur qui montait en moi et qui faisait s’entrechoquer mes dents.
- Calmez-vous, s’il vous plait. Vous voyez pas dans quel état elle est ?
- Mais qu’est-ce que j’en ai à foutre ! cette sale petite pute m’a piqué un petit paquet qu’elle a intérêt à me rendre fissa où j’peux lui jurer que son prochain tour de chant, c’est en enfer qu’elle le fera !
Je sentais confusément que le problème semblait assez sérieux. Je tentais une nouvelle approche. Pendant ce temps, le mini Monsieur Loyal était venu vers Lian et lui tenait la main dans un geste d’une humanité qui m’émut malgré la situation dramatique dans laquelle nous étions plongés.
- Je ne sais pas de quel paquet vous parlez mais je suis certaine qu’il y a une explication.
Ce dont j’étais certaine, surtout, c’est que je m’interposais dans une histoire qui n’était pas la mienne et dont je risquais fort de subir quelques dommages collatéraux. Entre temps, Lian, avec l’aide de Monsieur Loyal, s’était relevée. Son aspect était encore plus pitoyable debout. Je remarquais aussitôt la surprise affichée sur le visage du coléreux. Un bon point pour moi, il n’avais pas l’air d’être le responsable de toute cette violence et en semblait même sacrément étonné.
- Putain, c’est quoi ça ?!
Lian titubait. Je la rattrapais de justesse et la maintins fermement dans mes bras.
- Vous feriez mieux de nous aider !
L’homme me regarda froidement. Je sentis comme la lame glaciale d’un couteau me frôler tout le visage.
- Vous aidez ?! Cette salope me pique pour 30.000 euros de… marchandises et c’est moi qui devrait vous aider ?!
L’homme partit d’un éclat de rire gras et sonore, mais se reprit très vite, de plus en plus effrayant qu’il semblait reprendre son calme.
- Je lui donne deux jours, deux petits jours pour tout remettre en ordre et me rendre ce qui m’appartient. Juste deux jours ! Maintenant, elle dégage de mon cabaret.
On sentait qu’il ne fallait pas discuter. Profitant de cette inattendue mansuétude, soutenant toujours à bout de bras Lian, je me dirigeais vers la sortie, mais l’homme, toujours au beau milieu du passage, ne bougea pas. Il me regardait fixement.
- Tu crois que tu vas où là ?
- … Je sors…
- Ha non, t’as rien compris ma chérie… elle, elle y va, toi tu restes ! Attends, j’ai besoin de garantie moi. Tu crois que je vais la lâcher dans la nature sans être sûre qu’elle revienne.
Il se mit à sourire et je détestais aussitôt ce sourire.
- Vous avez l’air de bien vous entendre, toutes les deux…je me souviens de toi l’autre jour. Déjà elle avait l’air de bien te plaire la gamine… je vous ai vu vous tripoter… T’avais l’air d’avoir bien envie qu’elle vienne te la lècher ta chatte avec sa langue de p’tite gouineuse… Hein, la gousse ?! Alors tu vas l’attendre là bien gentiment avec ton p’tit minou d’sale gouine…et pis si elle revient pas, moi je m’occupe personnellement de toi et crois-moi, j’ai un calibre qui va te la remettre d’aplomb ta chatte de brouteuse !
Il y a certaines choses que je ne supporte pas du tout dans la vie, et je dois bien avouer que la grossièreté occupe l’une des premières places. Je ressentis la détente expresse d’un ressort au fond de moi. Sans autre forme de réflexion ni d’analyse objective des conséquences directes de mon geste, et ce malgré l’étroitesse remarquable de la pièce, je décochais un violent coup de pied en direction du malotrus qui l’atteint en pleine course, au niveau du plexus. L’homme me regarda, surpris, suffoqué, porta la main à sa poitrine et s’écroula sans un mot. Mon coup de pied inattendu venait d’être d’une efficacité imparable.
J’en restais presque figée d’étonnement moi-même. Mais je sentais bien confusément que le temps qui m’était imparti, était surtout compté. Je récupérais Lian soutenue tant bien que mal par le demi Loyal que je remerciais du regard. Il me désigna la porte d’un geste vif pour m’encourager à quitter les lieux au plus vite pendant que l’insupportable et odieux personnage revenait doucement à lui. Je ne demandais pas mon reste et quittais le cabaret, Lian agrippée à moi.
J’avais laissée la voiture non loin du Moulin Rouge, sur les voies de bus, n’ayant trouvé aucune autre place à cette heure encombrée. La Jaguar de Nicole Cisgnac trônait au beau milieu de la Place Blanche et était, malencontreusement, pour l’heure, flanquée d’un véhicule de police. La rédactrice avait insisté pour m’accompagner prétextant, et à juste titre, qu’à cette heure de la nuit, je ne trouverai aucun taxi pour me rendre rapidement de la brasserie où nous dînions jusqu’au cabaret. Je savais qu’elle avait raison et n’avais pas vraiment le temps pour une autre option. Je l’avais alors vaguement briefée pendant le trajet, sans trop rentrer dans les détails, mais lui signifiant évidemment, mon intérêt pour la belle…Il fallait bien que la Cisgnac comprenne l’urgence de la situation.
Vu l’état de Lian et afin d’éviter d’allumer la curiosité chez nos braves fonctionnaires, j’asseyais la jeune femme sous un abribus et me rendit, le plus nonchalamment possible, vers la voiture. J’entendis, de loin, la voix haut perchée de la rédactrice.
- Narcoleptique, monsieur ! ça ne veut pas dire que je prend de la drogue ! C’est juste que, si je m’endors, et bien, je m’endors ! Regardez, j’ai un papier du médecin qui stipule mon handicap.
- Papier du véhicule, s’il vous plaît..
- Mais vous êtes bouché où quoi ?!
Je tentais désespérément de faire signe à Nicole pour lui signaler ma présence et tenter de calmer son ardeur vis à vis des deux policiers qu’elle allait finir par énerver. Soudain, le silence se fit de son côté. Les deux policiers se penchèrent vers elle.
- Madame ?… Hoho… Madame ?….
Je profitai de l’accalmie soudaine et rejoignis le petit groupe, claquant sur mes lèvres un sourire à la Séguéla. Un rapide coup d’oeil me confirma mes supputations : devant son volant, la Cisgnac s’était endormie.
- Bonsoir messieurs, il y a un problème ?
- Vous connaissez cette personne ?
- Oui, c’est ma tante, elle est narc… elle a une maladie…j’étais partie chercher ses médicaments à la pharmacie.
Ce disant, je me mordit les lèvres n’ayant aucun paquet à la main. Mais nos deux fonctionnaires avertis ne s’en préoccupèrent guère.
- Oui ben, faut pas qu’elle reste là.
- Je m’en occupe messieurs.
Tout ne pouvant pas se passer complètement mal, je reçus alors l’aide inopinée mais providentielle d’un appel radio qui accapara aussitôt l’attention des tuniques bleues et les fit quitter la place promptement non sans m’avoir enjoint une dernière fois de libérer les lieux immédiatement. Moi, pendant ce temps, j’évaluais la situation. D’un côté, j’avais Lian, prostrée toujours assise à l’abribus, de l’autre, la Cisgnac endormie au volant de sa Jaguar.
Je m’apprêtais à faire une tentative d’éveil en douceur lorsque cette dernière leva un œil puis l’autre.
- Dites donc, ma petite, vous auriez pu trouver autre chose que « ma tante » !
- Vous ne dormiez pas ?
- Vous me prenez pour qui ?! Bon, tu l’as récupérée ta copine ?
- Elle est assise là-bas.
- Houla…
Nicole Cisgnac, alors que je m’y attendais pas du tout se leva d’un bond et se dirigea vers Lian qu’elle ausculta d’un air attentif.
- Et ben, on t’as pas ratée ma chérie… Faut l’emmener à l’hôpital, tout de suite.
Cette phrase donna un sursaut d’énergie à Lian qui protesta.
- Non.. pas l’hôpital… pas ça…
Elle tenta alors de se lever comme si elle voulait nous fausser compagnie. Nicoles Cisgnac la rattrapa.
- Hou poupoupoupoupe… Tu vas nulle part comme ça… (se retournant vers moi). Rendez-vous utile voulez-vous, reculez la voiture jusqu’ici.
Lian continuait de gémir.
- Pas l’hôpital… pas ça…
- T’inquiètes pas ma grande… (se retournant à nouveau vers moi) Vous attendez quoi ? Que je me rendorme ?
A ces mots, je me précipitai vers la voiture, fis une rapide manœuvre et me portai à la hauteur des deux femmes. Cisgnac glissa Lian sur la banquette arrière et vint me rejoindre à l’avant.
- Allez-y démarrez !
- Je vais où ?
- Ben où voulez-vous aller ? Chez moi ! On va chez moi !… Non, mais sans blague ! (à la voiture qui nous bloquait devant) et il dégage celui-là, oui !…. Je me sens dans une forme, moi !
Et sans plus attendre, Nicole piqua du menton en fermant les yeux. Derrière, Lian s’était allongée et ne bougeait plus, à peine gémissante. Je pris la direction de l’Ouest parisien en tentant de faire le point sur les 30 dernières minutes qui venaient de s’écouler.
Nous déposâmes Lian sur le canapé blanc du salon. Cisgnac partit aussitôt chercher une trousse à pharmacie et revint avec une bouteille de whisky qu’elle me tendit.
- Tenez, avalez-moi ça. Vous êtes tellement blanche que vous allez me faire une syncope si ça continue. On en a assez d’une !
Avec une dextérité déconcertante, Cisgnac déballa coton, alcool, désinfectant et se mit à nettoyer avec une grande douceur le visage de Lian.. Suivant les conseils de la rédactrice, j’avalais une gorgée de whisky qui me brûla la trachée mais me fit du bien, comme un coup de fouet dont j’avais terriblement besoin. J’admirais les gestes précis de la rédactrice.
- On dirait que vous avez fait ça toute votre vie…
- Deux ans d’étude de médecine, ma petite ! Juste le temps de trouver mon premier mari. Mais ça a été une erreur, je déteste l’odeur de l’éther. J’ai largué le bonhomme au bout d’un an.
J’avisai la photo d’un homme sur un petit guéridon.
- C’est lui ?
- Ha non, ça, c’est mon regretté Oscar, un bien bel avocat… et lui ne m’a coûté qu’un an d’étude de droits ! Enfin…comme on dit…ça peut toujours servir…
Quel bien curieux personnage cette Nicole Cisgnac mais je devais bien m’avouer qu’au fur et à mesure, ses brusqueries, ses coups de tête fantasques et ses endormissements subits commençaient à me plaire et à me la rendre sympathique. Pendant ce temps, Lian semblait revenir à elle. Elle s’était redressée et reprenait des couleurs. Sa blessure à l’arcade semblait moins grave que je ne l’avais présumé, sa lèvre commençait également à désenfler. Elle tenta un maigre sourire qui finit en petite grimace de douleur. Cisgnac rangeait son matériel en la dévisageant.
- Bienvenue dans le monde des vivants, jolie mademoiselle…
- Merci… mais vous êtes qui ?
- Pour l’instant, votre sauveuse et accessoirement, la patronne de l’autre petite, là-bas… à qui vous devez aussi une fière chandelle, je crois.
- Oui…
Lian tourna vers moi ses grands yeux sombres dans lesquels je vis instantanément perler une larme. En un millième de seconde supplémentaire, son corps fut secoué de sanglots énormes, irrépressibles, déchirants. La Cisgnac leva les yeux au ciel.
- Bon, moi j’ai fait ce que j’avais à faire, maintenant, cela ne me regarde plus. Vous m’excuserez, je garde ma chambre. On n’est pas encore assez intime pour que je vous la cède. J’éteins en partant et surtout, non, ne me remerciez pas… c’est bien naturel… j’ai faim, moi…
Nicole Cisgnac quitta le salon, éteignant derrière elle, ne laissant qu’une petite lampe de table allumée. La pénombre était agréable et chaleureuse. Je m’assis à côté de Lian et la pris dans mes bras. Elle ne cessait d’être agitée de lourds sanglots.
- Qu’est-ce qu’il se passe, Lian ?… il va falloir que tu me parles, tu sais.
En guise de réponse, Lian se saisit de mes lèvres que je lui abandonnais aussitôt. J’avais terriblement envie de ce baiser. Je me rendis instantanément compte que tout mon corps, tout mon être n’aspirait pour l’heure qu’à être embrassée par cette femme, qu’à me retrouver dans ses bras, qu’à la serrer contre moi. Subitement, je me moquais de ne rien comprendre à cette situation confuse. Rien ne comptait d’autre que ce corps contre le mien, ce désir que je sentais m’envahir et qui éveillait chaque millimètre de ma peau.
Lian laissa échapper un léger gémissement. J’eus peur de lui faire mal en la tenant ainsi contre moi. Je me dégageais légèrement.
- Je ne veux pas te faire mal, Lian.
- Alors continue, continue et fais moi du bien… fais moi oublier ma douleur, tu veux ?…. Continue… je t’en supplie…
- Lian… Qu’est-ce qu’il se passe ?
Mais Lian, comme je m’y attendais, ne répondit pas. Elle avait déjà ôté les deux tiers des boutons de ma chemise. Je l’aidais à ôter les derniers et me débarrassais du vêtement aussitôt. Lian se recula alors légèrement sur le canapé, le dos posé contre un large coussin, me regardant avec intensité, passant avec une douceur infinie ses mains sur mes seins ainsi dévoilés. Prompts à réagir, mes tétons se dressèrent, durs, avides de caresses, coupant net mon souffle, creusant mon ventre. J’éprouvais le besoin impérieux de ses doigts, de sa langue, du contact de sa peau. Je me sentais inondée de désirs pour elle, submergée, offerte. Chacun de ses gestes, de ses regards, de ses soupirs provoquaient en moi une alerte de jouissance, un pic de plaisir, le redoublement de mon excitation. Tout dans mon corps se trouvait être en vie, en éveil. Je n’étais plus qu’attentes, désirs. Je voulais me donner, je voulais la prendre.
A mon tour, je dégrafais un a un les boutons de son chemisier que j’ouvris pour découvrir, alors, avec effroi, d’autres ecchymoses. Mon dieu ! Mais quel monstre avait pu abîmer ainsi ce corps aussi parfait ? Avec délicatesse, dans la terreur de lui provoquer une quelconque douleur, j’enlevais à Lian son chemisier, puis, avec un nombre de gestes au minimum réduits, son soutien-gorge. Lian grimaçait à chacun de mes mouvements malgré sa tentative de continuer de me sourire, son regard perdu dans le mien, comme si, accrochée dans le vide, j’étais devenu son seul salut.
- Lian…
- C’est rien… c’est rien, je t’assure… Ne… ne me demandes rien…
Mais comment pouvais-je rester indifférente devant ce massacre ? Lian me rapprocha d’elle.
- Embrasse-moi, je t’en supplie…
Osant à peine poser mes lèvres sur sa peau, j’embrassais ce corps par petites touches, mon visage contournant ses seins, frôlant son ventre, revenant vers ses lèvres. Je contrôlais avec peine un désir qui me foudroyait les jambes, irradiait mes cuisses, me martelait le bas-ventre. Je n’étais plus qu’offrande, ouverture, flux, fièvre. Je fis glisser avec tout autant d’attention que pour le chemisier, le pantalon de Lian et quittais le mien également. Nous étions désormais presque nues, n’ayant conservé que notre mince sous-vêtement qui nous cachait alors, comme un dernier petit rempart bien fragile, l’envie que nous avions l’une de l’autre, l’autre de l’une.
J’avais entendu dire que parfois, l’amour, est comme une petite mort. J’en prenais enfin toute la mesure. A chaque geste, chaque respiration, chaque soupir, je défaillais, prête à exhaler mon dernier souffle sans regret aucun. Mon désir était tel qu’il me tuait et me ressuscitait en même temps. Je ne savais plus ce que je ressentais, de plaisirs, d’impatiences, de fulgurances. Je glissais ma main entre les cuisses de Lian qui se cambra et gémit mais retint aussitôt la main que j’allais enlever, de peur encore de la blesser.
- Non… reste… mais je ne peux pas…
Je sentais Lian au bord du malaise pourtant, elle aussi était noyée de cet extraordinaire substance de vie, si chaude, liquide, douce à caresser, glissante, excitante, délicatement goûteuse et odorante. Je ne voulais qu’y plonger mon visage, me perdre dans ses plis, m’y noyer moi-même, de ma langue, de mes lèvres, de ma bouche, de mon souffle l’amener à ce point de non retour ou soudain, tout s’ouvre, tout explose, tout se donne, tout s’écarte.
Lian respirait difficilement et je n’arrivais pas à savoir qu’elle était la part de sa jouissance et celle de sa douleur.
Soudain, elle ouvrit grands ses yeux, plantant son regard encore plus profond, jusque dans mon âme, entrouvrit la bouche dont sortit le plus indescriptible des soupirs, s’agrippa à moi pendant que tout son corps se tendait, s’écartait, se donnait, jouissait.
Je vins avec elle, dans la plus belle et violente des harmonies.
Auteure (romans, nouvelles, chansons), scénariste, amoureuse des mots et des arbres...
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